Publié le 7 octobre 2020 par Laure
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Modifié le 30 janvier 2024 à 16H57
Les États Généraux du numérique éducatif interviennent dans le contexte inédit de la crise sanitaire du Covid-19. Ils vont se dérouler à un moment clé de l’histoire récente du numérique à l’École où l’usage de ce dernier, de marginal est devenu central voire quasi exclusif pendant plusieurs semaines.
Il n’est pas neutre de souligner que ce changement d’échelle n’a été le fruit ni d’une injonction politique nationale, ni des efforts conséquents réalisés ces dernières années par les collectivités territoriales en matière d’équipement et de maintenance, ni d’une soudaine adhésion des enseignants à une nouvelle forme scolaire mais qu’il s’est produit sous la pression d’un facteur exogène à l’éducation, celui d’un virus !
À l'heure du bilan
Notre entreprise, leader sur le marché des ENT, s’est trouvée directement plongée au cœur de cette crise inédite. Dans ce contexte si particulier, nous n’avons pas peur d’affirmer que notre solution, principalement diffusée dans le 2nd degré, a constitué la clé de voûte de la continuité scolaire sur les territoires où elle est déployée (40% des enseignants étaient connectés simultanément sur nos plateformes, 95% les ont utilisées). Grâce à elle, partout, et même si on évalue entre 6% à 10% le nombre de décrocheurs, le lien fondamental entre élève et professeur a été préservé. De plus, son usage à grande échelle durant 4 mois a constitué une formidable acculturation accélérée au numérique de la communauté éducative.Ceci nous offre une formidable opportunité de poser les bonnes questions et surtout d’y apporter les meilleures réponses alors que l’existence de fractures territoriales, et plus encore sociales, sont soulignées par beaucoup. La pandémie a changé la donne et elle a agi comme un véritable révélateur. Les États Généraux du numérique doivent faire en sorte de tirer les leçons des réussites comme des échecs qui ont émaillé ces derniers mois. Pour le dire en deux mots, il y a des endroits où « cela a marché » et pas à d’autres : comprenons pourquoi !
Nous attendons donc de ces États Généraux qu’ils adoptent une démarche pragmatique et commencent par dresser un véritable bilan des semaines qui viennent de s’écouler. Des études sont déjà parues sur le sujet, notamment celle du réseau Canopé. Les récentes auditions de la Commission parlementaire présidée par le député Bruno Studer ont également permis de tirer un premier bilan. Nous attendons que celui-ci soit consolidé à l’occasion des États Généraux. Sans diagnostic partagé, sans données publiques fiables sur ce qui a fonctionné et ce qui a échoué nous serons collectivement enclins à répéter les mêmes erreurs qui ont fait que jusqu’ici le numérique ne s’est pas véritablement imposé au sein de l’institution scolaire.
En tant qu’opérateur nous n’avons pas vocation à intervenir sur les dimensions les plus strictement pédagogiques du débat mais notre présence dans 21 académies, 49 départements et 4 régions nous légitime à proposer certains axes de réflexion en articulation ou en complément de ceux proposés dans le cadre de la consultation des États Généraux du numérique.
Nos axes de réflexion
Premier axe de réflexion, qui se rattache à celui plus général de la gouvernance, celui de l’anticipation. Nous avons tous été contraints d’agir dans l’urgence dès l’annonce de la fermeture des établissements. Une information en amont des différents opérateurs, publics ou privés, aurait sans doute permis d’éviter les difficultés rencontrées dans les premiers jours. Nous aurions même pu articuler nos services avec ceux de l’opérateur public qu’est le CNED dans une logique de complémentarité. Cela n’a pas été fait mais cela pourrait se faire à l’avenir via l’existence d’un plan prévisionnel de crise, à l’instar de ce qui existe dans le secteur de la santé avec le « plan blanc ». De notre capacité à anticiper dépendra fortement notre capacité à faire face à une future crise.Un second axe de réflexion concerne les priorités de financement. La période a révélé la primauté des plateformes logicielles. Il s’agit là d’un vrai changement de paradigme, qui impacte les budgets, la durée des projets, leur pilotage et les compétences requises pour les mener à bien. Quelle nouvelle gouvernance cela appelle-t-il ?
Sur la gouvernance précisément, il nous paraît nécessaire de renforcer le pilotage partagé Collectivités/État avec sans doute une étape supplémentaire dans la clarification des compétences déjà initiée par la loi de 2013.
Sur la problématique de l’accès aux services, nous souhaiterions que soit clairement posée la question de l’équipement des familles et des enseignants. La généralisation du télétravail a conduit les entreprises à équiper leurs salariés, pourquoi n’en irait-il pas de même pour les enseignants, alors même que l’on risque d’évoluer vers de nouvelles formes scolaires hybrides, pandémie ou pas ? Pour ce qui concerne les élèves, nous pensons que la fourniture par les familles d’un outil numérique au titre des fournitures scolaires associée à des aides ciblées pour les plus modestes constitue la bonne approche. Mais nous plaidons également pour des expérimentations sur une nouvelle forme scolaire, plus moderne et plus ouverte, de type École 42.
Nous proposons également d’avancer sur une véritable culture de l’évaluation à partir d‘indicateurs de suivi simples mais aussi d'un état des lieux objectif du portefeuille des projets numériques structurants. Les différences d’usage que nous avons constatées entre territoires voire entre établissements, au-delà même de la période de confinement, sont-elles la résultante d’une disparité d’équipement ou le fruit d’une différenciation dans le pilotage, l’accompagnement et le choix des services ? La question mérite d’être posée…
Nous souhaiterions par ailleurs que soit éclaircie la problématique de la fracture entre le premier et le second degré. Les ENT, pour ne citer qu’eux, sont massivement présents dans les collèges et lycées, encore peu représentés dans les écoles. Choix pédagogique assumé ou simple reflet de décisions politiques locales ? Peut-on gagner en efficacité en diffusant les bonnes pratiques du 2D vers le 1D et en particulier les ENT ou faut-il une approche spécifique ?
D’autres thématiques ne manqueront pas d’émerger à l’occasion des débats en région et des contributions sur le site national. Nous les suivrons attentivement et, forts de notre expérience terrain, nous ne manquerons pas de vous faire part de notre propre vision et de nos propositions concrètes sur plusieurs des sujets évoqués dans les tout prochains jours.